Si les thérapies alternatives ne sont pas toujours délétères, dans certains cas elles peuvent conduire à des refus de soin ou à des abandons de traitements. L'issue est parfois dramatique.
"Elle a refusé le traitement, même la chimiothérapie. Le cancer du sein s'est propagé, elle avait des métastases partout. Elle ne voulait même pas les soins palliatifs, la morphine. Quand elle buvait un verre d'eau, les métastases gonflaient, elle hurlait de douleur et se recroquevillait dans un coin. La fin de sa vie a été épouvantable".
Depuis la crise sanitaire et à cause du partage de fausses informations "médicales" sur les réseaux sociaux, nombreux sont ceux qui se détournent de leurs traitements et suivis médicaux.
Sur son site, la Mission interministérielle de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes), pose que "les promesses et recettes de guérison, de bien-être et de développement personnel sont au cœur des pratiques à risque de dérives sectaires".
Dérives thérapeutiques
Les patients se dirigent vers des "thérapies alternatives", de plus en plus en vogue. 57 % des Français croiraient en leur efficacité selon un sondage Odoxa pour l'UNADFI (Union nationale des associations de défense de familles victimes de sectes). Il existe 400 pratiques non conventionnelles et 4 Français sur 10 y ont recours. Parmi eux, 60 % sont atteints de cancers.
Plusieurs croyances donnent lieu à des dérives. Les "New âge", prônent l'utilisation de traitements à base de plantes, de cristaux ou autres pratiques ésotériques. Le crudivorisme, défend une "médecine" à base de manger-cru et de jus de légumes. L'anthroposophie est un mouvement fondé sur les thèses du "docteur" Steiner, refusant les traitements médicaux, la contraception, et prônant la contamination à certains virus "bénéfiques pour l'âme".
Refus de soins
Grégoire Perra, ex-adepte de la médecine anthroposophique, se souvient de cas de refus de soins par des patients qui, au moment de leur diagnostic, avaient un bon pronostic.
La femme dont il raconte le terrible cancer du sein, détecté à un stade précoce, a vécu quatre ans de douleurs, refusant de se faire soigner au nom de ce que lui disaient ses médecins anthroposophes : "Elle a essayé de se soigner avec des jus de légumes, en ne mangeant plus de viande". Refusant jusqu'aux soins palliatifs, la quinquagénaire est morte dans une "souffrance atroce".
Ce sont les proches des adeptes, victimes collatérales, qui font ces signalements : "Ma mère va se faire opérer et ne veut pas de transfusion", "Mon père est à risque, il ne veut pas de vaccin", "Ma mère a arrêté son traitement contre la méningite"... Sur les groupes Facebook dits "anti-sectes", ils sont nombreux à déplorer les dégâts de telles pratiques.
Sous emprise
Parfois, frôler la mort est insuffisant pour que les victimes prennent conscience des effets délétères de leurs croyances.
"Elle a fait une occlusion intestinale. Son 'médecin' anthroposophe lui disait que ça passerait. Au bout de douze jours de douleurs, elle a été opérée en urgence. Les médecins lui ont dit qu’à une heure près, elle y passait, son intestin se nécrosait".
Malgré cette expérience, cette patiente, Julie, ne se détournera pas de l'anthroposophie, refusant d'accabler son "médecin" de sa mauvaise expérience : "Dans cette croyance, quand un traitement ne marche pas, quand on est malade, c’est de notre faute", nous explique Grégoire Pérra.
Nombreux sont les patients qui refusent de faire demi-tour. Empêtrés dans des croyances fortes, sous l'emprise de gourous : renoncer à leurs idées, fussent-elles sectaires et délétères, est inconcevable.
L'impuissance
Les médecins assistent impuissants à ces abandons, déplore Philippe Cathala, président de l'Ordre des médecins de l'Hérault : "Dès lors que ça arrive à des connaissances, il est préconisé de signaler les cas de mise en danger. Les préfectures, la Mivilude, l’Agence régionale de santé... agissent. Mais les gens à l’intérieur [des sectes] ne parlent pas".
Depuis la pandémie, la peur de tomber malade est très présente. Apparaissent des stratégies : celle du déni, du complot, de la fuite...
Les adeptes de théories complotistes ou de dérives sectaires s'éloignent de la médecine, à leurs dépens. Cherchant du sens dans des théories alternatives, approximatives... ils se perdent dans les méandres d'emprises mentales solides et imparables.